sadfrog le 9 décembre 2023

Hier soir, je suis allée voir au théâtre la pièce de Roger Hall, « Winding Up ».

La salle était bien pleine mais, jusqu’à ce qu’on baisse les lumières, j’étais la seule assise dans la dernière rangée des sièges.  À la dernier minute, deux ombres s’y sont glissées. J’ai reconnu les deux ouvreuses du théâtre.

La pièce était très bien.  Mais j’ai vite compris que les deux ouvreuses jouaient un autre rôle aussi. Elles faisaient la claque.

« Faire la claque » signifie faire démarrer les applaudissements au moments appropriés dans un spectacle pour encourager les spectateurs. C’était un précurseur des « rires enregistrés » qu’on entendait souvent dans les séries américaines.  La pratique est toujours présente dans les spectacles de pantomime lorsqu’on hue les méchants.

La pratique de la claque n’est pas une chose nouvelle. Elle date de l’Antiquité mais au dix-neuvième siècle, contre des billets gratuits, on pouvait louer une troupe de claqueurs qui recevaient une liste de passages où ils devaient applaudir. Un « chef de claque » déterminait où les efforts des « claqueurs » étaient nécessaires.  À part les simples applaudisseurs, il y avait plusieurs types de « claqueurs » :
* les rieurs riaient bruyamment aux plaisanteries
* les pleureurs, généralement des femmes, feignaient les larmes, le mouchoir aux yeux
* les chatouilleurs entretenaient la bonne humeur du public
* les bisseurs applaudissaient en criant « Bis ! Bis ! » pour demander les rappels.

Une pièce applaudie est une pièce à succès. Donc, il y avait également des troupes qui faisaient un peu de chantage. Payer une taxe, ou se faire siffler et huer – le choix était simple.

Mais pour revenir à la pièce d’hier, mon subconscient s’est rapidement aligné avec ceux des « claqueurs ». On est devenues une troupe à trois. Je n’ai pas réclamé un billet gratuit pour mes efforts.  La pièce n’a pas eu besoin de « claqueurs ». Les rires étaient spontanés. La pièce volait de ses propres ailes.